La mère et la fille

Elissa et Alionor étaient toute deux dans la chambre. Pour une fois que la baronne avait du temps à accorder à sa charmante petite fille !



Elle lui apprenait à jouer de la mandoline, et aussi l'art de bien se tenir, et parfois elles parlaient, tout simplement.

-"Vous savez, ma très chère petite fille..."

Elissa laissa sa phrase en suspens.

Alionor rayonnait de joie. Il était rare que sa mère s'occupe autant d'elle. La petite fille cessa de pincer délicatement les cordes de l'instrument pour lui faire face.

_ Qu'y-a-t il, mère ? demanda-t-elle avec un sourire empli d'innocence.

Elissa, profondément attendrie par le regard de son enfant, la serra dans ses bras.

-"Je vous aime, ma toute douce... Vous êtes mon rayon de soleil. La famille est ce qui m'apporte le plus de bonheur. Gardez cela en mémoire : vous pourrez au cours de votre vie être amenée à comploter, à participer à diverses intrigues, mais jamais, au grand jamais, vous ne devrez trahir les liens du sang, car ce sont les plus importants aux yeux de notre seigneur.

Connaissez-vous l'histoire de Caïn et Abel ? C'était les deux premiers frères de l'humanité... La discorde s'est installée entre eux, et Caïn a tué Abel. Il est devenu le premier meurtrier de l'humanité, le premier fratricide qui plus est, et notre Seigneur Dieu l'a puni.

Si je vous raconte cela... Bientôt peut-être, si Dieu le veut, vous aurez un frère, ou une soeur. Qu'en dites-vous, ma petite colombe ?"

Alionor se leva pour saluer son père puis l'embrassa doucement. Elle appréciait pleinement le moment, en compagnie de ses deux parents - chose fort rare par ailleurs - mais comprenait bien qu'ils lui cachaient quelque chose.

Elle revint vers le lit pour reprendre la mandoline entre ses petites mains.

_ Mère, pourquoi me dites-vous cela ? Je ne veux pas trahir mon sang. Et quand bien même je n'ai pas de frère, ni de soeur ! Père, que se passe-t-il ?

Elissa sourit tendrement et embrassa sa petite fille pour la calmer.

-"Allons, allons, je n'ai jamais prétendu une telle chose, ma toute petite. Je vous fais confiance... Ce qu'il se passe, c'est que j'attends un enfant."

La baronne croisa le regard enamouré de Jehan, et c'était comme si quelqu'un avait décroché les étoiles du ciel pour les mettre dans ses yeux. [HRP : je ne pouvais laisser passer cette superbe référence à l'IRL de Clermont ]

Alionor bondit de joie. Elle allait avoir un petit frère ou un petite soeur, enfin il y aurait un autre enfant dans la maisonnée !

_ Oh mère ! C'est merveilleux !!! J'espère pour vous que ce sera un garçon ( ) ! Quand viendra-t-il ?

-"Ces choses là prennent du temps, ma toute petite ! D'ici une huitaine de mois, si Dieu le veut, nous serons quatre !"

Quatre. Ils seraient quatre ! Quelle joie ! Alionor pourrait laisser ses poupées pour s'occuper d'un vrai nourrisson, et avec un peu de chance Henriette ferait moins attention à elle ... Il faudrait la changer, d'ailleurs, cette gouvernante. Incapable de tenir sa langue, commère comme pas deux et surtout mauvais exemple de débauche pour une jeune damoiselle.

_ Père ! Avez-vous choisi un nom ? Qui sera le parrain ? Qui la marraine ?

Elissa s'attendrit de l'enthousiasme de sa fille.

-"Patience, patience !"